La CSRD, la nouvelle directive de l’Union Européenne vise à normaliser et à renforcer davantage lesexigences du reporting de durabilité.
Les entreprises seront tenues de fournir des informations détaillées sur la façon dont ellestraitent plusieurs sujets environnementaux, sociaux et de gouvernance, y compris l’impact financier lié au climat et les impacts liés à l’entreprise sur l’environnement, et comment ces sujets sont gérés, déclarés et surveillés en interne.
Pour vous aider à vous préparer avant l’entrée en vigueur de cette directive, nous avons rassemblé les réponses aux questions les plus fréquemment posées sur la CSRD.
1. Qu’est-ce que la CSRD ?
La CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) est le nouveau règlement de l’UE exigeant des grandes et moyennes entreprises qu’elles rendent compte de leur impact environnemental et social ainsi que de leurs objectifs d’atténuation et des progrès accomplis dans la réalisation de ces objectifs. Son but est d’encourager les entreprises à développer des modèles d’affaire plus responsables et durables, tout en permettant aux investisseurs d’évaluer plus facilement les informations sur la durabilité et de les comparer à celles de leurs pairs. La CSRD contribue au Pacte Vert (Green Deal) pour l’Europe, un ensemble d’initiatives politiques visant à permettre à l’UE d’atteindre la neutralité climatique d’ici 2050.
Elle remplacera l’actuelle directive NFRD (Non Financial Reporting Directive) établie en 2014.
La CSRD étendra le champ d’application de la NFRD tout en l’alignant sur la divulgation financière et les normes de divulgation de la durabilité acceptées dans le monde entier, en particulier la TCFD.
En résumé, laCSRD va induire des changements importants :
· Les critères Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance (ESG) font désormais partie intégrante du processus de reporting annuel, aux côtés de l’information financière.
· La quantité et la qualité des données à collecter et à contrôler vont s’accroître considérablement.
· Le nombre de personnes impliquées dans le processus au sein de l’entreprise augmentera également.
· Les entreprises déclarantes devront définir et mettre en œuvre une feuille de route alignée sur la limitation du réchauffement climatique à 1,5 ° C et atteindre des émissions nettes nulles (objectif Net Zéro) d’ici 2050, et rendre compte de leurs progrès par rapport à ces objectifs.
· Les données sur la durabilité seront auditées.
2. À qui s’appliquera-t-elle et quand ?
La CSRD s’appliquera à toutes les entreprises cotées sur les marchés réglementés – à l’exception des micro-entreprises dont le chiffre d’affaires est inférieur à 2 M€ ou dont l’effectif est inférieur à 10 salariés – et à toutes les entreprises qui répondent à au moins 2 des 3 critères suivants :
· Au moins 250 employés
· Au moins 40 M€ de chiffre d’affaires net
· Au moins 20 M€ d’actifs
En outre, la CSRD s’appliquera non seulement aux entreprises basées dans l’UE, ainsi qu’aux filiales européennes d’entreprises dont le siège social est situé en dehors de l’UE mais qui réalisent un chiffre d’affaires d’au moins 150 millions d’euros en Union Européenne.
On estime qu’environ 50 000 entreprises auront à se conformer à la CSRD.
Les PME qui en font partie suivront certaines règles spécifiques. Voir la question 8 ci-dessous.
Gardez à l’esprit que les premières entreprises déclarant en 2023 et 2024 déclencheront probablement un effet d’entraînement sur leurs fournisseurs pour fournir des informations et un plan d’action conformes à la CSRD, même si ces dernières entreprises ne sont pas encore obligées de se conformer à la CSRD.
3. Quelles sont les principales caractéristiques de la CSRD ?
L’un desprincipaux concepts de la CSRD est la double matérialité :
- Matérialitéf inancière : Divulgation de toutes les questions de durabilité qui peuvent avoir des effets financiers importants sur les entreprises, c’est-à-dire qu’elles génèrent ou peuvent générer des risques ou des opportunités importants qui influencent ou sont susceptibles d’influencer les flux de trésorerie futurs et, par conséquent, la valeur de l’entreprise à court, moyen ou long terme.
- Matérialité d’impact : Impacts significatifs réels ou potentiels de l’entreprise sur les personnes ou l’environnement à court, moyen ou long terme. Cela inclut les impacts directement provoqués par l’entreprise dans ses propres opérations, produits ou services et les impacts qui sont par ailleurs directement liés à la chaîne de valeur en amont et en aval de l’entreprise, sans s’y limiter aux relations contractuelles.
Qualité de l’information : Pour garantir des données de haute qualité et dignes de confiance, la CSRD exige des entreprises qu’elles divulguent des informations de manière cohérente, pertinente, comparable, fiable et vérifiable.
Matérialité: Toutes les exigences d’information indépendantes du secteur et propres à un secteur sont réputées importantes (au sens de matérielles) pour une entité. Les entités peuvent réfuter cette importance lorsqu’elles estiment que de telles exigences de divulgation ne sont pas pertinentes pour elles, mais doivent alors l’étayer par des preuves raisonnables.
4. Quelles informations sur la durabilité devront être divulguées ?
Les normes de reportings (ESRS – European Sustainability Reporting Standards) suivent unearchitecture 3x3, surnommée « la règle de trois » :
Ø 3 niveaux d’information :
· Indépendantes du secteur,
· Spécifiques au secteur
· Spécifiques à l’entité
Ø 3 domaines de reporting :
· Stratégie: stratégie d’entreprise et modèle d’affaire, gouvernance, évaluation des risques, opportunités & impacts (cf. double matérialité)
· Mise en œuvre (objectifs, plans d’action, ressources allouées et gestion)
· Mesure de la performance (indicateurs permettant de surveiller les progrès par rapport aux objectifs fixés)
Ø 3 thèmes ESG (Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance).
Ses exigences englobent les sujets suivants :
Environmental: Ces cinq impacts environnementaux s’alignent sur la taxonomie de l’UE.
Social:
Gouvernance:
5. Comment puis-je faire un reporting pour la CSRD ?
La CSRD vise à amener l’information sur le développement durable à un niveau de qualité similaire à celui de l’information financière. Les entreprises devront rendre compte chaque année de la façon dont elles évaluent et gèrent leurs défis liés aux critères ESG.
Le reporting devra inclure des données qualitatives et quantitatives, aborder des horizons à court, moyen et long terme et couvrir l’ensemble de la chaîne de valeur de l’entreprise déclarante. Les stratégies d’atténuation doivent être cohérentes avec les dernières données scientifiques sur le climat.
La CSRD exige l’inclusion d’informations sur la durabilité dans une section dédiée de leur rapport de gestion annuel. Comme pour l’information financière, la gouvernance de l’entreprise sera responsable du reporting sur le développement durable. Elle exige également la vérification des rapports annuels et consolidés sur le développement durable par le commissaire aux comptes qui vérifie les états financiers ou par un autre auditeur tiers.
La CSRD souhaite que les entreprises préparent leur rapport au format XHTML (règlement ESEF – European Single Electronic Format), car les informations déclarées doivent être facilement accessibles aux investisseurs et aux autres parties prenantes dans la base de données européenne des points d’accès uniques (ESAP).
Par conséquent, les entreprises devront « étiqueter » leurs informations de durabilité déclarées selon un nouveau système de catégorisation numérique.
6. Quels avantages la CSRD apportera-t-elle à mon entreprise ?
Au-delà du simple respect de cette nouvelle réglementation, la CSRD peut apporter les avantages suivants à un entreprise :
· Attirer les investisseurs
- La durabilité est devenue un aspect clé de l’entreprise, à court et à long terme.
- En particulier, la taxonomie de l’UE exige des entreprises relevant du champ d’application de la NFRD ou de la CSRD qu’elles divulguent le degré de durabilité environnementale de leurs activités, sur la base des impacts énumérés à la question 4.
- En se conformant à la CSRD, les entreprises satisferont également aux exigences de la Taxonomie de l’UE (Green Taxonomy), qui permettent de flécher les investissements vers les actifs et fonds « verts ».
· Améliorer l’attractivité de la marque
- Étant donné qu’une part croissante des consommateurs attendent des entreprises qu’elles aient un impact positif sur l’environnement, les entreprises qui progressent en matière d’ESG attireront et fidéliseront davantage les consommateurs. Les entreprises qui vendent des produits et des services à haute valeur ajoutée peuvent aussi souvent vendre des produits respectueux de l’environnement à un prix supérieur, sous réserve que cette information soit étayée par des preuves suffisantes.
- Il en va de même pour les entreprises BtoB : les entreprises conformes à la CSRD qui vendent à de grandes entreprises qui ont déjà ou sont en train de mettre en place une stratégie de développement durable auront un avantage sur leurs concurrents, car elles auront une contribution positive directe à l’empreinte de leurs clients.
· Collaborez tout au long de la chaîne devaleur
- Dans la plupart des industries, la chaîne d’approvisionnement représente plus d’émissions que les propres émissions d’une entreprise. Les exigences de la CSRD se répercuteront sur les fournisseurs, puis sur les fournisseurs des fournisseurs. C’est une bonne occasion de vous engager davantage avec vos fournisseurs pour améliorer les produits et services en collaboration.
· Attirer et fidéliser les employés
- Dans la plupart des industries, les personnes sont l’atout le plus précieux d’une entreprise.
- 9 Millennials sur 10 pensent que le succès d’une entreprise doit également être mesuré du point de vue de la vie environnementale et sociale (source : G&A, Fast Company)
· Soutenir les décisions stratégiques
- La CSRD met fortement l’accent sur l’évaluation des risques, des opportunités et des impacts (cf. double matérialité abordée à la question 3). Grâce à la CSRD, les entreprises auront une bonne vue d’ensemble de leurs impacts environnementaux et sociaux, ainsi que des risques et opportunités liés au climat pour leurs entreprises. Il permet aux comités exécutifs des entreprises de prendre de meilleures décisions stratégiques pour assurer la pérennité de leurs activités.
- La CSRD repose sur la conviction qu’il ne peut y avoir de performance financière durable sans performance environnementale et sociale, et sans prise en compte des contraintes afférentes.
7. Je suis une PME. Qu’est-ce que la CSRD signifie pour moi ?
Les PME qui répondent aux critères énumérés à la question 2 auront à faire leur reporting à partir du 1er janvier 2027, au lieu de 2026 comme prévu initialement.
Les PME cotées suivront une norme plus simple, qui sera spécifiée dans une deuxième série de normes qui sera adoptée par la Commission européenne d’ici la mi-2024.
Les PME non cotées peuvent choisir de déclarer ou non conformément à la CSRD sur une base volontaire. Cependant, les PME recevront probablement de plus en plus de demandes de la part de leurs grands clients BtoB pour au moins fournir des informations supplémentaires et même se conformer à la CSRD (cf. collaboration sur l’ensemble de la chaîne de valeur à la question 6). De même, les PME qui se conforment à la CSRD auront un avantage sur leurs concurrents pour obtenir de nouveaux marchés des grandes entreprises.
8. Je suis une entreprise non européenne. Qu’est-ce que la CSRD signifie pour moi ?
Sont concernées les entreprises internationales ayant des activités significatives dans l’UE (au moins 150 millions d’euros de chiffre d’affaires en Europe) et au moins une filiale répondant aux critères énumérés à la question 2, ou une succursale qui a généré un chiffre d’affaires net d’au moins 40 millions d’euros au cours de l’année précédente. Ces entreprises déclareront à partir du 1er janvier 2029.
Ces entreprises suivront une norme spécifique, qui sera spécifiée dans un deuxième ensemble de normes qui sera adopté par la Commission européenne d’ici la mi-2024.
La CSRD est conçu pour mieux s’aligner sur les normes internationales, telles que la TCFD, tant que ces normes sont alignées sur les objectifs et critères européens. Gardez à l’esprit que la CSRD est globalement plus stricte que les normes internationales actuelles et couvre un champ d’application plus large.
Les filiales européennes d’entreprises non cotées en bourse et dont le siège social est situé en dehors de l’UE peuvent être autorisées à ne pas faire de déclaration à la CSRD si leur entreprise mère publie déjà des rapports sur le développement durable conformes à la CSRD.
Les entreprises internationales devront peut-être s’aligner simultanément sur plusieurs normes de reporting en matière de développement durable, car la SEC américaine (Securities and Exchange Commission) et l’ISSB (International SustainabilityStandard Board) de l’IFRS Foundation ont toutes deux publié des normes pour consultation en 2021 et 2022. Bonne nouvelle, ces trois normes partagent une base commune, le cadre élaboré par la TCFD (Task force on Climate-related Financial Disclosure).
La CSRD est le plus normatif à l’heure actuelle et est le seul à présenter la notion de double matérialité (voir question 3).
9. Comment puis-je commencer ?
Commencez à vous préparer dès maintenant pour vous assurer que vous serez prêt à respecter le délai de divulgation prévu.
Même si l’échéance de 2026, et a fortiori de 2027 ou 2028, paraît lointaine, une anticipation suffisante sera un facteur clé de réussite, afin d’aborder ce reporting dans de bonnes conditions et d’en tirer le meilleur parti. La CSRD induit un changement d’esprit important, en transformant un exercice de reporting annuel en un enjeu stratégique et prospectif pour les entreprises. Sans préparation adéquate ni anticipation, la marche sera haute.
1. Nommez une personne responsable de la conformité et de la performance en matière de développement durable.
2. Mesurez votre empreinte de référence : GES et environnement, si vous ne l’avez pas encore fait.
3. Evaluez votre double matérialité : risques & opportunités & impacts : environnement, social, gouvernance.
4. Fixer des objectifs et demander au Comex de les approuver.
5. Alignez-vous en interne sur votre empreinte de référence, votre matérialité et vos objectifs: du Comex jusqu’aux employés.
6. Intégrez vos principaux fournisseurs et partenaires sur les considérations environnementales et sociales.
7. Entamez la conversation avec un auditeur tiers pour vous assurer de l’alignement avec les exigences de certification : données, processus, surveillance.
8. Définissez et commencez à surveiller vos indicateursclés de performance (KPI) pour les critères ESG.